Zone villas: consensus en vue d'une levée du gel des dérogations

Un consensus a été trouvé autour d'une nouvelle version de l'article 59, al. 4 de la loi sur les constructions et installations (LCI), qui régit les dérogations en matière de densité en zone villa. M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat, M. Cyril Aellen, député et auteur du projet de loi 12566, et le comité de l'Association des communes genevoises (ACG), ont identifié les principales orientations qui devront présider à un développement maîtrisé et de qualité de la zone villa. Des dérogations seront possibles dans des périmètres de densification accrue définis par le plan directeur de la commune (PDCom) approuvé par le Conseil d’Etat. Par ailleurs, ces projets de densification en zone villa seront à l'avenir soumis à la taxe d'équipement, à l'instar des autres projets urbains. A terme, les dérogations seront ainsi à nouveau possibles, pour autant que la qualité soit au rendez-vous. Des critères d'analyse partagés par l'ensemble des acteurs seront fournis dans le guide qualité, dont la mise à jour est en cours. Ces principes ont réuni une majorité de la commission de l’aménagement du territoire. Ils devront encore être validés par la plénière du Grand Conseil.

La création de périmètres de densification accrue identifiés par les autorités communales dans leurs plans directeurs permet d'établir une véritable stratégie de planification sur la zone villa. "Cette dernière a vocation à se développer, mais pas partout et pas n’importe comment. Le développement prévu doit s’effectuer en tenant compte de l’avis des communes et dans le respect des conditions de vie des habitants", rappelle M. Cyril Aellen, député et auteur du PL 12566. Les communes auront ainsi la possibilité de développer leur vision de la densification de cette zone, qui devra être prise en compte par les services cantonaux et les entités chargées des préavis. Sachant que certaines communes accueillent des zones villas conséquentes, il est particulièrement important qu'elles retrouvent la maîtrise de leur développement territorial qui a fait défaut ces dernières années. A ce sujet, M. Philippe Schwarm, membre du comité de l’ACG, relève que "pour remédier aux effets négatifs de la densification exacerbée qu’a connue la zone villas ces dernières années, il est primordial que la prise en compte des sensibilités locales soit rétablie par un renforcement du rôle des communes dans le processus de délivrance de ces autorisations de construire". Dans le même esprit, au vu de l'impact de ces densifications sur les voies de communication publiques, une participation des propriétaires aux coûts engendrés est aujourd'hui nécessaire. La taxe d'équipement, qui constitue une contribution des propriétaires ou des superficiaires aux coûts de réalisation, d’adaptation ou de maintenance des voies de communication publiques, pourra ainsi s'appliquer pour ces projets.

M. David Martin, député et président de la commission d'aménagement, salue la qualité des discussions parlementaires: "L’esprit de dialogue qui a prévalu lors des travaux de la commission de l’aménagement a permis d’aboutir à un consensus réunissant une large majorité. Je veux croire que c’est un premier pas vers une pacification des questions d’aménagement à Genève et une plus grande attention portée à la qualité des constructions."

Les communes auront jusqu'au 1er janvier 2023 pour mettre à jour leur PDCom. Jusqu'à ce terme, le préavis favorable de la commune est nécessaire à la délivrance d'une autorisation. Une disposition transitoire indique qu'en l'absence de PDCom adopté à temps, le canton pourra accorder des dérogations dans les communes qui n'auront pas fixé de périmètre de densification accrue dans leur plan communal.

Prochaine étape: l'analyse qualitative des projets

En novembre le dernier, le DT annonçait lancer le bilan et l'éventuelle mise à jour du guide pratique "Les nouveaux quartiers jardins du XXIe siècle", établi en 2017 en collaboration avec l'Association des communes genevoises. Ce travail, actuellement en cours, permettra d'affiner encore l'analyse des projets. Un regard particulier sera porté sur la compatibilité des projets avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier. Le DT et l'ensemble des partenaires conviennent de l'importance de renforcer encore les exigences de qualité dans les projets en zone villa. Ils partagent par exemple le constat d'une trop faible intégration paysagère, d'un bétonnage excessif du sol et d'une faible prise en compte de la biodiversité. L'aboutissement de ce second volet est prévu à l'automne 2020.

"Le renforcement du rôle des communes, conjugué à l'obligation d'un périmètre de densification accru selon le plan directeur communal et à l'exigence qualitative des projets, notamment en matière de préservation de la pleine terre, constituent une vision aboutie pour pallier les effets négatifs de la densification accrue qu'a connue la zone villa ces dernières années", conclut M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat chargé du DT.

Pour autant que ces modifications législatives soient adoptées et que le guide reflète une convergence de vue, le DT pourrait reprendre l'octroi des dérogations selon l'article 59, al. 4 LCI avant la fin de l'année 2020.

Rappel du contexte

Pour rappel, depuis janvier 2013, les propriétaires peuvent augmenter la densité de leurs parcelles situées en zone villas sans modification de zone (MZ) selon l’article 59, alinéa 4 de la loi sur les constructions et les installations diverses (LCI). Cette possibilité a été fortement sollicitée, car environ 160 hectares ont été consommés ces cinq dernières années, reflétant une augmentation du nombre de requêtes de 30%. Ce phénomène s'est opéré souvent de manière peu harmonieuse et respectueuse des qualités environnementales et paysagères des périmètres concernés, amenant un développement non coordonné, sans vision d’ensemble de la zone villas, avec une répétition des formes bâties. C'est pourquoi le DT n’accorde plus de dérogations au sens de l'article 59, alinéa 4 LCI pour les dossiers déposés après le 28 novembre 2019, le temps que les conditions soient réunies pour permettre une densification plus qualitative.