Ce même article, ainsi que de l'article 12P du règlement d'application de la loi sur l'énergie (L 2 30.01; REn) prévoient néanmoins qu'une dérogation à l'obligation de la pose de capteurs solaires thermiques puisse être accordée sous certaines conditions et sur requête dûment justifiée.
EBM (Energy Blog Manager) – En ce moment, tout le monde ne jure que par le solaire photovoltaïque. Le solaire thermique serait-il une technologie désuète ?
AeK – Pour réussir la transition énergétique, nous aurons besoin de toutes les énergies renouvelables, sous forme de chaleur comme sous forme d’électricité. Le plus important, ce qui est attendu des requérants, c’est qu'ils ne considèrent pas une solution que sous l’angle économique mais aussi sous l’angle de la nécessaire transition énergétique et de l’utilisation rationnelle des ressources renouvelables.
EBM – Du moment que l'on valorise la toiture, quelle différence cela fait-il pour l'administration, que le propriétaire choisisse d'installer du photovoltaïque ou du solaire thermique ?
AeK – D'abord, l'obligation de couvrir 30% des besoins en eau chaude sanitaire est inscrite dans la loi. Genève était, il y a 30 ans déjà, l'un des premiers cantons à soutenir cette technologie simple qui permet de valoriser efficacement les apports solaires lorsqu'il y en a. Pour l’administration, le dispositif légal et réglementaire mise sur une valorisation de la toiture et/ou des façades. Selon les cas de figures, les choix technologiques et architecturaux dépendent aussi des standards énergétiques visés.
EBM – Votre page internet indique qu'une dérogation au solaire thermique est possible sur les bâtiments raccordés à un réseau de chauffage à distance (CAD). Expliquez-nous svp.
AeK – Ce choix est basé sur l’art. 1 de la LEn qui détermine ‘’les mesures visant notamment à l’utilisation rationnelle et économe de l’énergie et au développement prioritaire et à l’exploitation des sources d’énergies renouvelables et indigènes’’. Le principal réseau de chauffage à distance de Genève - CADIOM-CAD-SIG - est alimenté par les rejets de chaleur de l'usine d'incinération des Cheneviers. L'usine travaille aussi en été alors que les besoins en chaleur sont moindres. Il serait peu efficient d'exiger des propriétaires de bâtiments raccordés sur ce réseau qu'ils investissent dans une installation solaire thermique pour préchauffer l'eau chaude sanitaire (ECS) alors que, par ailleurs, les rejets thermiques des Cheneviers ne peuvent pas (encore) être valorisés.
EBM – Pas encore ?
AeK – C'est qu'à terme, la plupart des grands réseaux sont appelés à être interconnectés. Au fur et à mesure de ce développement, la part de la chaleur produite par les Cheneviers en été sera mieux valorisée.
EBM – Il y a quelques mois, vous avez indiqué sur votre site que les propriétaires qui choisissaient la pompe à chaleur pour le chauffage et la préparation de l'eau chaude sanitaire pouvaient poser du photovoltaïque à la place du solaire thermique. C'est bien juste ?
AeK –S'il s’agit juste du minimum légal (HPE ou rénovation partielle), oui. Le REn prévoit effectivement que des dérogations à la pose de capteurs solaires thermiques puissent être accordées lorsque l'eau est chauffée à l'aide d'autres énergies renouvelables. Si le projet prévoit la mise en place d’une pompe à chaleur avec une valorisation de la toiture ou un assainissement de la toiture jumelé avec une modification de la production de chaleur (fossile vers PAC), pourquoi pas ? Toute autre demande de dérogation en dehors des cas précités doit faire l’objet d’une étude au cas par cas.
EBM – Par analogie, ceux qui visent la très haute performance énergétique (THPE) ne devraient-ils pas aussi avoir droit à cette dérogation ?
AeK – Il n y a pas de dérogation systématique. Le rôle de l’OCEN consiste à veiller à l'application de la loi sur l’énergie et de son règlement afin de conduire une politique publique qui vise une transition énergétique à court terme et une société à zéro carbone en 2050. Pour y arriver, le respect des exigences légales telles que décrites dans la loi et son règlement sont à respecter. Le législateur a prévu des exceptions dans certains cas. Afin de bénéficier du statut d'exception, il faut le démontrer par le biais des études et des justificatifs énergétiques détaillés. C'est sur cette base que l'administration décide, après analyse, si le projet remplit les critères d'exception pour accorder la dérogation.
Sauf cas exceptionnels (e.g. concepts énergétiques de bâtiments, bâtiments appartenant aux collectivités publiques), les standards THPE, HPE ou THPE-Rénovation THPE ne sont pas obligatoires ; il s’agit que d’un choix du propriétaire (sur la base de critères techniques et économiques) que l’OCEN soutient d'ailleurs par des subventions (Programme bâtiment). Or l'autorité ne déroge qu'à des obligations légales.
EBM – Mais si le choix s'est porté sur la PAC, n'est-il pas inutilement coûteux d'installer les deux technologies ?
AeK – Comme je vous le disais avant, pour réussir la transition énergétique, nous devrons avant tout valoriser les toitures au maximum et nous avons besoin d'énergie sous forme de chaleur et d'électricité.
EBM – Par exemple ?
AeK – Il est tout à fait possible de mettre en place les deux technologies, ou une des deux en combinaison avec d’autres ressources (géothermie ou autres). Je ne veux pas présenter des solutions, afin de ne pas créer "de nouveaux standards", mais j’ai toute confiance en la capacité de nos architectes et ingénieurs à nous proposer (et c’est déjà le cas) des solutions efficientes qui combinent intelligemment les deux technologies.
EBM – On compte sur eux ! Et pour plus de renseignements ?
AeK – Se référer à la loi (L 2 30) et au règlement (L 2 30.01) disponibles sur SIL Genève PUBLIC (silgeneve.ch). Tout est résumé sur notre site www.ge.ch - Demander une dérogation au solaire thermique
EBM – Je vous remercie.