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"3 questions à..."
"3 questions à..."
Aline Tièche et Stylianos Meintassis de la direction générale de l'enseignement obligatoire (DGEO) du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse (DIP) sont les invités de "3 questions à…" pour nous parler du dispositif mis en place à l'école primaire dans le cadre de l'Agenda Intégration Suisse (AIS).
Nous vous souhaitons une bonne lecture.

1) La direction générale de l'enseignement obligatoire (DGEO) a mis en place un suivi individualisé pour les enfants relevant du domaine de l'asile dans le cadre de l'Agenda Intégration Suisse (AIS). Pourriez-vous nous expliquer en quoi consistent ces prises en charge ?

L'école primaire genevoise prévoit différents dispositifs en faveur des élèves allophones primo-arrivants, indépendamment de l'AIS : entretien de premier accueil avec des interprètes de la Croix-Rouge, classe d'accueil dès la 4e primaire, soutien pédagogique, différenciation au niveau de l'enseignement et de l'évaluation.

Cependant, en raison de leur parcours migratoire et d'une scolarisation parfois lacunaire avant leur arrivée, la moitié des élèves réfugiés éligibles à l'AIS ont besoin de mesures d'aide supplémentaires pour s'intégrer et réussir à l'école. L'interprétariat et la médiation culturelle entre la famille et l'école sont assurés par des accompagnateurs et accompagnatrices familiales et scolaires en langue d'origine (AFS) que nous recrutons en collaboration avec le service interprétariat de la Croix-Rouge. Les AFS facilitent la communication entre parents, élèves et professionnels à propos de la vie scolaire et des objectifs d'apprentissage.

En plus de cette mission, les AFS évaluent les compétences et connaissances que l'élève a déjà acquises dans sa première langue, afin d'élaborer un projet pédagogique le plus ajusté possible. Un soutien scolaire individuel en langue d'origine est alors proposé, durant les heures d'école, dans la classe ou hors de la classe. Concrètement, l'AFS intervient auprès de l'élève à raison de trois à quatre périodes hebdomadaires en moyenne. Bien entendu, une collaboration régulière entre l'AFS, l'équipe enseignante et les case managers est nécessaire, afin d'adapter le dispositif au plus proche des besoins de l'élève.

Lorsque l'élève a acquis une compréhension suffisante du français, nous faisons appel à du personnel enseignant afin de poursuivre l'accompagnement individuel de l'élève avec du soutien en français.

En tant que case managers pour l'AIS scolaire, nous pouvons également proposer d'autres mesures, dites périscolaires, en étroite collaboration avec le BIE et nos autres partenaires institutionnels : cours en langue et culture d'origine, tutorat, médiation éducative ou toute autre activité favorisant l'intégration de l'enfant.     

 

2) Selon vous, est-ce que les différentes mesures développées dans le cadre de l'AIS permettent une accélération de l'intégration des élèves primo-arrivants dans les classes?

Les retours des professionnels et des familles sont très positifs. Grâce à l'accompagnement en langue d'origine, l'élève et sa famille sont rassurés et comprennent plus rapidement le fonctionnement et les attentes de l'école. Cela contribue à une entrée en scolarité sereine et constitue une base solide pour la suite.

L'intercompréhension entre l'élève allophone, ses camarades et son enseignante ou enseignant est facilitée, le lien se crée plus aisément. De plus, les équipes enseignantes observent une meilleure progression de leurs élèves lorsqu'un soutien en langue d'origine est mis en place au sein de l'école.

La plus-value du programme apparait clairement lorsque des élèves qui ont bénéficié d'un accompagnement sur mesure, pendant deux ou trois ans en moyenne, arrivent à poursuivre leur scolarité dans l'enseignement régulier et sans l'aide de l'AIS. 

  

3) Quels sont les principaux défis auxquels vous faites face au quotidien et comment parvenez-vous à y répondre ?

A l'âge de l'école primaire (4 à 12 ans), le développement de l'enfant est très rapide. Les besoins de nos élèves en matière d'accompagnement sont donc en constante évolution et nous devons être très réactifs afin d'y répondre au plus vite, suite à une analyse fine de chaque situation. Cela requiert une communication renforcée de notre part afin d'informer le personnel des établissements scolaires et de faire connaitre les possibilités offertes par l'AIS. De plus, chaque transition requiert une attention particulière : entrée à l'école, passage au Cycle d'orientation, déménagement.

Nous devons également en permanence recruter, former et accompagner sur le terrain de nouveaux et nouvelles AFS, dans les différentes langues et en suivant les besoins dictés par les flux migratoires. L'adaptation constante entre le personnel accompagnant et l'évolution des besoins constitue le plus grand défi pour garantir l'efficacité de notre dispositif. Dans cadre de l'attribution de la mesure de soutien scolaire en français, nous rencontrons également des difficultés de recrutement au niveau du personnel enseignant.

Enfin, certaines situations individuelles sont complexes, par exemple, lorsque des élèves réfugiés de plus de dix ans sont accueillis dans nos écoles sans avoir bénéficié de scolarité antérieure. Malgré toutes les mesures que nous pouvons mettre en place et toute l'attention portée par l'école, le processus d'apprentissage est inévitablement long et le décalage par rapport aux attentes scolaires persistera plusieurs années. Par ailleurs, certaines familles rencontrent de telles difficultés liées à leur parcours migratoire traumatique que, malgré un soutien intensif, leurs enfants restent très fragilisés. Dans ces cas-là, la communication entre tous les acteurs travaillant autour de ces enfants est essentielle et il convient de cibler au mieux les mesures les plus pertinentes, ainsi que d'assurer un suivi renforcé sur la durée.

 

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