La nouvelle saison de MasterChef, dont la diffusion a commencé le 23 août dernier, voit s'affronter dix-huit candidats dans une compétition culinaire. L'une des protagonistes en lice n'est autre que Dao Nguyen. Cette candidate au titre de meilleure cuisinière de l'année présente un profil pour le moins atypique. Directrice au sein de l'office pour l'orientation, la formation professionnelle et continue (OFPC), elle entretient avec la cuisine un rapport particulier. Très tôt, elle avait en effet décidé que cette activité ne constituerait jamais une priorité dans sa vie. La jeune femme avait en tout cas bien prévenu ses proches qu'elle ne sacrifierait à aucun diktat culturel lui imposant de gagner aux fourneaux un quelconque passeport de bonne mère ou de bonne épouse ! Dao Nguyen entendait clairement mettre ses priorités ailleurs. Ceci ne l'a toutefois pas empêchée de se fixer plus tard quelques défis gastronomiques. Compétitrice dans l'âme, elle a ainsi participé à des concours de cuisine qui lui ont valu quelques succès et des articles de presse. C'est à la faveur de l'un de ces articles, surnageant dans la revue de presse des responsables de l'organisation de MasterChef, qu'elle s'est fait repérer. S'en sont suivies des premières rencontres. Un casting. Une sélection pour intégrer la liste des compétiteurs de cette volée. Et le tournage d'une émission dont elle a contractuellement promis de ne pas divulguer le résultat. Il faudra donc attendre un peu avant de savoir si notre collègue est allée jusqu'en finale faire honneur à la cuisine, mais aussi à l'OFPC et au DIP !
Humilité
Quoiqu'elle ait sacrifié haut la main aux épreuves de sélection, Dao Nguyen reste humble quant à ses compétences culinaires. Elle confesse même volontiers quelques lacunes. Scientifique de formation, elle se dit davantage intéressée par le côté technique de la cuisine. Par l'expérimentation. Par la remise en cause de tous les théorèmes qu'elle n'a pas pu démontrer par elle-même. Peu de chances de la convaincre de tourner une fondue en huit si on ne lui en démontre pas le fondement scientifique ! N'hésitant pas à mobiliser ses compétences de laboratoires, elle recourt d'ailleurs volontiers à des techniques de cuisine moléculaire pour atteindre ses objectifs de goût.
"Je suis très complexée vis-à-vis de la cuisine. Traditionnellement, je fais des plats que j'ai mis au point à force de travail et d'entraînement grâce à l'entraînement intensif, telle une athlète, que mon mari met en place, puisqu'il me coache depuis mes débuts en cuisine. Avec cette compétition, j'ai pris confiance en moi. Et j'ai pu me prouver que j'étais capable de sortir un plat créatif et technique en improvisant avec des contraintes de temps importantes", explique-t-elle. Sans doute le fruit, chez elle, d'un parcours opiniâtre et d'une quête perpétuelle de dépassement de soi.
Saga universitaire
Petite, Dao Nguyen voulait être danseuse. Et actrice. Et pharmacienne. Et avocate. Ecrivaine, aussi… Mais pas tour à tour : en même temps ! Une petite quarantaine d'années plus tard, la jeune femme a bientôt coché toutes les cases. Cette compétition va lui faire camper un rôle à l'écran, pour lequel elle va pouvoir mettre en scène ses autres compétences. Directrice depuis près de quatre ans d'un important service au sein de l'office pour l'orientation, la formation professionnelle et continue (OFPC), elle a tout d'abord étudié la pharmacie puis a validé une thèse de doctorat ès-sciences pharmaceutiques intitulée Analyses rapides et ultra-rapides en chromatographie liquide : application aux composés pharmaceutiques.
Après quelques expériences en officine, puis dans le marketing de produits pharmaceutiques et un bref passage dans l'industrie pharmaceutique, cette première casquette universitaire l'attire vers l'enseignement, en qualité de responsable de l'unité de formation des apprentis (UFA) au sein de l'Université de Genève. Elle suivra pour cela une formation à la Haute école fédérale en formation professionnelle. Restait toutefois encore à répondre à la petite fille qui rêvait de devenir avocate… En 2012, Dao Nguyen s'inscrit à un bachelor de droit à UniDistance Suisse. Elle achève sa formation sur un mémoire intitulé "Conséquences de la résiliation injustifiée du contrat d'apprentissage". C'est ensuite parti pour un master à l'UNIGE, choisi sur la base des rares cours disponibles à distance.
Deuxième doctorat
Déjà lauréate du Prix Arditi en 1995, tandis qu'elle n'était encore que collégienne, Dao s'est convaincue qu'elle n'excellera pas dans la littérature. Cela ne devrait toutefois pas l'empêcher de faire la démonstration de sa grande imagination et de son sens de la construction avec le nouveau sujet de thèse doctorale dans lequel elle s'est investie pour parachever sa formation de juriste : ce travail de recherche en droit pénal la verra s'intéresser aux techniques de médecine légale et d'autopsies virtuelles, autour d'un scénario d'accident mortel impliquant un véhicule autonome. Tous les ingrédients du thriller semblent réunis, qui convoqueront par ailleurs ses compétences scientifiques et techniques.
Equilibres
Il en va de la gestion des équilibres comme de celle des saveurs… Dao Nguyen le reconnaît : cette quête d'excellence dans le domaine universitaire, professionnel jusque dans ses hobbies a un coût. Elle explique avoir dû drastiquement réduire ses loisirs et ses sorties, afin que son investissement tous azimuts ne porte jamais préjudice à son activité professionnelle. Dans ce domaine, il semble que la recette ait été couronnée de succès. Dao a même carrément le sentiment que le fait d'être redevenue étudiante lui permet définitivement de mieux comprendre les usagers qui se présentent à son service, afin de reprendre une formation en vue d'obtenir une AFP ou un CFC.
Lettre interne d'informations départementales -
article de l'édition du 2 septembre 2022