Un colloque met la santé au travail au cœur du développement durable

Réunis à la FER Genève, près de 90 personnes ont participé mardi matin à un colloque organisé par l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (OCIRT). Ce dernier a pu compter sur la présence de la conseillère d'Etat Fabienne Fischer, chargée du département de l'économie et de l'emploi (DEE). L'événement réunissait des responsables et des spécialistes du développement durable, de l'économie circulaire, de la santé au travail, des ressources humaines et de l'économie en général. Des échanges ont eu lieu sur l'avenir de la santé au travail dans une société qui tend vers la durabilité et qui promeut la transition écologique. L'objectif prioritaire était de faire profiter les milieux concernés de réflexions et de travaux récents en lien avec les défis à relever et les opportunités à saisir dans un tel contexte.

La promotion et la prévention de la santé, les parents pauvres du système suisse

En 2021, en Suisse, les prestataires de soins ont généré des factures pour plus de 36 milliards de francs. A Genève, ce montant s’élève à 2,4 milliards. Comme l'a rappelé Fabienne Fischer, les soins sont en bout de chaîne d’une politique de santé publique. En première ligne se trouvent la promotion et la prévention de la santé. Or, celles-ci représentent à peine 3% des dépenses totales du système de santé suisse. Ainsi, notre pays se situe dans la moitié inférieure des pays de l’OCDE pour les dépenses liées à la promotion et la prévention. Pour la magistrate, il s'agit clairement de changer l’allocation des ressources et de se donner les moyens d’agir en amont. En outre, la protection de la santé au travail et la garantie d'un travail soutenable ne doivent pas être oubliées en raison des impératifs économiques et environnementaux.

Prendre le temps de traiter la santé et la sécurité au travail malgré l'urgence climatique

Pour la directrice générale de l'OCIRT, Christina Stoll, il faut impérativement se donner le temps et les moyens d'intégrer la santé et la sécurité au travail dans les réflexions et les stratégies en lien avec la durabilité. Car la transition écologique urgente et incontournable génère forcément de nouvelles activités et formes de travail, qui peuvent s'accompagner de nouveaux risques pour la santé et la sécurité au travail.

Spécialiste de la santé et la sécurité au travail à l'Organisation internationale du travail (OIT), Halim Hamzaoui a notamment souligné que 1,2 milliards d'emplois dans le monde, soit 40% de la population active, sont aujourd'hui menacés en raison de la dégradation de l'environnement. L'impact de cette dégradation sur la santé humaine est important et ne se limite pas à l'augmentation de la chaleur. Or, un environnement de travail sûr et sain est un principe et un droit fondamental du travail. Les nouveaux emplois de l'économie verte doivent ainsi garantir l'absence de risques environnementaux. Les opportunités économiques de la transition écologique doivent aller de pair avec une gestion des risques identifiés, notamment sur les travailleurs et les travailleuses en situation vulnérable.

Soutenir les micro-entreprises de l'économie verte face au défi de la santé au travail

Les spécialistes s'accordent sur le fait que, si elles sont bien gérées sur le plan environnemental et social, les transitions vers des économies durables peuvent devenir un puissant moteur de création d'emplois et d'innovation. Néanmoins, à l'exemple de l'économie circulaire, ces transitions ne sont pas dépourvues d'impact sur la santé et la sécurité au travail. Mme Catherine Montagnon, directrice scientifique de l'étude prospective sur l'économie circulaire de l'institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS), a ainsi évoqué les risques possibles. Elle les a illustrés à travers des exemples concrets de recyclage, en soulignant que la prévention doit être intégrée en amont de la production. Elle ne doit pas être perçue comme une contrainte externe, mais comme un levier essentiel pour améliorer la performance globale des entreprises, y compris des très petites entreprises qui se multiplient au sein de l'économie verte. Pour elle, ces entreprises doivent être soutenues et encadrées par leurs faîtières et les collectivités publiques.

Faire rimer l'économie circulaire avec l'économie solidaire

Le colloque a finalement permis de mettre en évidence l'importance de la responsabilité sociale des entreprises (RSE), un atout de plus en plus incontournable pour attirer les talents en recherche de sens. Un travail de la HEG sur les pratiques RSE dans les entreprises en Suisse romande a montré que la santé au travail est déjà un axe pris en considération et que la RSE ne saurait se déployer en dehors d'un contexte de durabilité. L'implication des spécialistes de la santé au travail pour déployer la RSE dans les entreprises semble incontournable. Finalement, la présentation d'un projet participatif autour du mieux-vivre à Genève, impliquant les citoyennes et les citoyens du canton, a permis de faire émerger des questions centrales autour du travail. Repenser le travail signifie repenser le temps à disposition. L'idée de "moins travailler et moins gagner pour mieux vivre" a été l'une des pistes évoquées par les participantes et les participants. Face à une population en quête de sens et de justice sociale, allier l'économie circulaire à l'économie solidaire serait un pas supplémentaire vers la durabilité.

L'OCIRT organise presque chaque année un colloque sur un thème d'actualité en lien avec la santé au travail.

Annexes:

 

Pour tout complément d'information: Mme Esther Mamarbachi, porte-parole, DEE, esther.mamarbachi@etat.ge.chT. 022 327 92 72 ou 078 628 80 08.