Observatoire transfrontalier des personnels de santé : premières données chiffrées et une réflexion commune engagée

Professions de la santé
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Créé il y a tout juste un an, sous l’égide de la Commission Santé du Comité Régional Franco Genevois, par le Département de l’emploi, des affaires sociales et de la santé (DEAS) du canton de Genève et l’Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes, l’observatoire transfrontalier des personnels de santé, vient de publier ses premiers résultats. Les huit établissements contributeurs* ont permis de recueillir des données sur les parcours des professionnels de santé et identifier les besoins en personnel des systèmes de santé respectifs. Ces indicateurs documentent et nourrissent la réflexion commune concernant les vacances de postes, les flux de personnel  - recrutements et départs -, le recours aux stages et contribuent ainsi à la lutte contre la pénurie des professionnels de santé de part et d'autre de la frontière.

Zoom sur les infirmiers et aides-soignants à l'hôpital

Pour cette première année d’étude, le champ d’observation a volontairement été limité aux établissements publics du champ sanitaire, avec un focus sur les deux professions largement prédominantes et impactées par la transfrontalité : les aides-soignant-e-s et les infirmier-ère-s.
Les données récoltées confirment que 80% des personnels de santé du territoire travaillent dans les établissements sanitaires publics. Les infirmiers et les aides-soignants représentent 94% des effectifs dans les établissements publics de la Haute-Savoie et 72% côté genevois. En 2015, plus de 5 800 infirmiers et 3 470 aides-soignants ont été recensés dans les établissements participants à l’étude.

Pour l’État de Genève et l'ARS, ce nouvel outil se veut facilitateur de dialogue et d’une meilleure collaboration sanitaire transfrontalière, au bénéfice des populations.

 

La répartition des infirmiers entre les établissements en 2015 est la suivante :

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De 2014 à 2015, l'augmentation des effectifs infirmiers est de 3%, soit 168 postes, dont 89 postes pourvus aux HUG.

 

L'analyse du flux des personnels

Les données fournies par les établissements sanitaires ont permis de dresser la balance de l’emploi de l’année 2015 :

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Les constats tirés de l'analyse des motifs de départ et du turn-over sont les suivants :

  • Les établissements français connaissent un taux important de postes vacants avec une grande proportion de faisant-fonction1  sur les postes d’infirmiers spécialisés et d’aides-soignants, alors que les HUG fonctionnent en quasi plein emploi.
  • Au niveau du turn-over des effectifs, les établissements français connaissent un taux important : 25% pour le CHANGE et 21% pour le CH Alpes Léman, alors que le taux aux HUG n'est que de 4%.
  • La cause de départ principale est liée à une mise en disponibilité2. Les établissements français ont vu 20% de leur effectif d’infirmiers partis en 2015 (455 départs dont 154 liés à une mise en disponibilité) et 19% des effectifs des aides-soignants (281 départs dont 52 pour mise en disponibilité).
  • Concernant les départs en retraite, les établissements de part et d’autre de la frontière, interrogés pour les trois prochaines années, projettent le départ à venir jusqu’en 2019, de 218 infirmières et 107 aides-soignantes.

Le système de mise en disponibilité ainsi que l'attractivité du canton de Genève favorise une mobilité massive du personnel ce qui déstabilise la continuité de service et alourdit la gestion administrative des équipes.

 

Les chiffres

Origine des diplômes et lieu de résidences du personnel soignant employé dans le canton de Genève. Selon les statistiques tirées du bilan social 2014 de l'Etat de Genève 35% des diplômés aux HUG sont d'origine française. Au niveau des infirmiers la proportion est de 67%. Pour les aides-soignants, elle est de 37%. Une analyse du lieu de résidence des personnels permanents réalisée par la direction des soins des HUG a pu dénombrer, pour les infirmières et sur les neuf premiers mois de l’année 2016 uniquement, l’effectif des personnels français titulaires dont ceux résidant dans l’Ain ou la Haute-Savoie : les 2 243 infirmiers français recensés assurent ainsi près des deux tiers des postes permanents des HUG. Ces infirmiers transfrontaliers des HUG résident à 87% en Haute-Savoie.

 

Les leviers d'action: formation et politique de recrutement

Pour développer leur attractivité et fidéliser les jeunes diplômés, les établissements français ont pris des mesures portant principalement sur la formation et l’accueil des stagiaires. Ils proposent notamment :

  • l’attribution d’une allocation d’études (800€ par mois pendant deux ans maximum en contrepartie d’exercer dans l’établissement pendant la durée de l’allocation versée). 115 allocations d'études ont été comptabilisées en 2014-2015 ainsi que 13 demandes de rachat,
  • une formation qualifiante pour les faisant-fonctions d’aides-soignants et cadre de santé,
  • et des contacts privilégiés avec les établissements de formation et écoles,
  • ainsi que des actions internes d’accompagnement à la prise de poste.

Du côté genevois, la mise en application de la préférence indigène a conduit les HUG à adapter leur politique de recrutement. Pour toute embauche étrangère, l'hôpital universitaire   doit désormais obtenir l'attestation de l’office cantonal de l’emploi, qu’aucun candidat suisse n’est en recherche d’emploi sur le poste à pourvoir.

Par ailleurs, pour suppléer les infirmières manquantes dans certains actes techniques, ils ont créé deux nouvelles qualifications intermédiaires :

  • l'Assistant en Soins et Santé Communautaire (qualification supérieure aux aides-soignantes) : 97 postes d’assistant (ASSC) ont été créés aux HUG et probablement encore une vingtaine seront ouverts au 1er semestre 2017.
  • le Technicien de Salle d'Opération (qualification émergente) : 4 sont en activité et une dizaine seront engagés en 2017.

Dans le cadre du programme de lutte contre la pénurie des professionnels de la santé du canton, les HUG ont également doublé leur capacité de formation en 3 ans (passant de 80 places à 150 places aujourd'hui).

Il faut rappeler ici que, conscient de la problématique liée à la pénurie des professionnels de la santé et à l'augmentation des besoins liée notamment au vieillissement de la population, le canton de Genève a pris ses responsabilités afin d'accroître le potentiel de formation et augmenter son autonomie en la matière.

Il a depuis 2012 lancé un vaste programme comprenant 22 actions dont l'une vise à réaliser un tableau de bord qui alimente également les données de l'Observatoire.

L’observatoire va poursuivre ses travaux dans le but de :

  • consolider le recueil des données ;
  • élargir le champ d’observation à d’autres personnels, aux établissements privés et au secteur médico-social ;
  • développer les échanges entre les services des ressources humaines afin de mieux anticiper les départs de personnels français ;
  • échanger sur des pistes d’adaptation des métiers.
 
Contact médias

Pour la Suisse : M. Laurent Paoliello, DEAS, +41 79 935 86 75
Pour la France : Mme Amélie Roux-Rubio  +33 42 786 55 55

 

 

* Les Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG) et 7 établissements de santé français :

  • le centre hospitalier Annecy-Genevois (CHANGE),
  • le centre hospitalier Alpes Léman (CHAL) à Contamine sur Arve,
  • les hôpitaux du Pays du Mont Blanc (HPMB) à Sallanches,
  • les hôpitaux du Léman (HDL) à Thonon-les-Bains,
  • l’Etablissement public de santé mentale (EPSM) de la Roche sur Foron,
  • le centre hospitalier de Reignier (à vocation gériatrique),
  • le centre hospitalier du Pays de Gex (à vocation gériatrique)

1 Faisant-fonction : catégorie de personnel employé dans les établissements français (titulaires ou sous contrat) exerçant une fonction, sans avoir le diplôme pré-requis. Ces personnels que l’on trouve en France essentiellement sur les postes d'infirmier spécialisé ou d'aide-soignant sont engagés le plus souvent dans un cursus de formation pour l’obtention du diplôme.

2 Mise en disponibilité : possibilité offerte par l'administration française de se mettre en disponibilité et de réintégrer son poste initial. Pour la fonction publique hospitalière, la durée maximale de cette disponibilité est de dix ans et pour une seule fois dans la carrière.