
Engagé, pédagogue et profondément humain, le maître socioprofessionnel (MSP) accompagne les personnes en difficulté dans des activités professionnelles. Fort de sa propre expérience, il les aide à développer des compétences favorisant leur autonomie. Interview de Stéphane Girod, directeur de l’ARPIH, école supérieure du domaine social à Yverdon-les-Bains.
En quoi consiste le métier?
Le MSP accompagne les personnes en situation de handicap ou présentant des difficultés sociales: handicap physique ou mental, réinsertion, milieu carcéral ou dépendances. Son rôle est de proposer des activités adaptées à chaque individu, afin de développer ses compétences professionnelles et sociales. Concrètement, il transmet son savoir-faire dans un cadre adapté. Le MSP cuisinier enseignera les bases de la cuisine, tandis que le MSP menuisier formera dans un atelier bois. La profession repose sur trois dimensions: pédagogique, car le professionnel doit être capable de transmettre son savoir-faire; d’accompagnement, puisqu’il soutient des personnes en difficulté; et une dimension économique afin d’organiser le travail et fournir une prestation ou un produit.
Quelles sont les institutions employant des MSP?
Ce sont principalement des organisations publiques ou privées œuvrant dans le domaine du handicap ou de l’insertion. De plus en plus d’entreprises privées nouent des partenariats avec des institutions sociales, créant par exemple une cafétéria gérée par des personnes en réinsertion. Des entreprises comme Planzer, Migros, Coop, DSM-Firmenich, Givaudan ou encore l’Aéroport de Genève sont conquises par la mesure et constituent des partenaires privilégiés.
Quelle formation faut-il entreprendre?
La formation se déroule en école supérieure à Yverdon-les-Bains, Sion ou La Chaux-de-Fonds. D’une durée de trois ans, elle s’effectue en cours d’emploi. Toutefois, il faut d’abord être engagé en tant que MSP avant d’y accéder. En effet, les employeurs recrutent des candidats ayant des compétences métier, puis ils leur proposent la formation. La moyenne d’âge des étudiants est de plus de 30 ans, dont certains sont en réorientation professionnelle.
Une expérience dans le social n’est donc pas un prérequis?
Non, l’essentiel est de disposer de compétences métier. Il est cependant indispensable d’avoir une forte sensibilité sociale et de l’empathie afin d’accompagner efficacement ce public.
Comment se déroule la formation?
La formation alterne entre enseignements à Yverdon-les-Bains et pratique professionnelle encadrée dans les institutions ou entreprises sociales. Elle est orientée pratique avec, notamment, un travail de diplôme qui est un projet à mettre en œuvre. Nous recommandons de ne pas avoir un taux d’activité trop élevé, car la formation elle-même représente déjà 20% d’un emploi à temps plein.
École supérieure Formation MSP à l’ARPIH
Elivanda Jacinto: du tourisme au social
«J’ai d’abord travaillé dans le tourisme au Brésil, puis quelques années dans la vente à Genève. Sensible à la dimension humaine et à la relation d’aide présentes dans ces métiers, j’ai toujours été attirée par le secteur social.» Lors d’une brève période sans emploi, Elivanda Jacinto Silva a décroché, via les mesures d’insertion du chômage, une place au sein des Établissements publics pour l’intégration (EPI).
«Dès les premiers jours, j’ai su que le métier était fait pour moi. L’accompagnement de personnes en situation de handicap dans des activités artisanales et de vente a donné un nouveau sens à ma pratique. Après quelques remplacements, j’ai obtenu un poste fixe à la Fondation Sgipa, que je n’ai plus quitté!» Aujourd’hui, Elivanda Jacinto Silva travaille au sein d’un atelier où une douzaine de collaborateurs s’occupent notamment de travaux de sous-traitance.
Ces personnes sont également détachées auprès d’entreprises privées genevoises pour effectuer des tâches d’entretien ou dans le domaine de la restauration. «Les voir s’investir et progresser est très gratifiant», confie-t-elle. Si l’aspect humain du métier est une source d’épanouissement, le volet économique représente un défi d’équilibriste.
«Il faut accompagner les collaborateurs tout en assumant une charge de travail conséquente et en respectant les délais. » Un bon équilibre qu’elle applique également à sa formation. «Je travaille à 60%, ce qui me permet de dégager du temps pour mes études.» Dans le cadre de son travail de diplôme, Elivanda Jacinto Silva organise des séances sur la communication non violente entre les personnes qui travaillent dans l’atelier.
Toute l'information sur la formation professionnelle: www.citedesmetiers.ch
Texte : Léonore Ehrsam-Bimpage, Office pour l’orientation, la formation professionnelle et continue, DIP
Photo de couverture: Laurent Guiraud
Article également paru dans la Tribune de Genève du 13 Mars 2025